LAÏCITÉ : UNE LOI POUR LEVER L'AMBIGUÏTÉ !

 

 

 

Une loi ! Ainsi donc le chef de l’État a tranché, il y aura bien une loi pour défendre la laïcité à l’école de la République, vraisemblablement aussi une loi pour l’hôpital...

 

Au MRC, nous avons toujours milité pour la laïcité au sein de l’école de la République car elle implique l’égalité, réfute toute forme de privilège spirituel comme social pour accueillir tous les enfants et leur donner les connaissances, l’exercice de la raison et du jugement critique, la capacité de s’élever. Dès le 13 mai 2003, avant le grand débat médiatique, les Sénateurs MRC déposaient une « proposition de loi visant à garantir le principe de laïcité au sein de l’école publique et de la fonction publique. » Nous n’allons donc pas bouder notre plaisir !

 

L’exercice n’est cependant pas simple. La rédaction de ce texte ne doit pas réintroduire une liberté d’interprétation du juge qui ne nous libèrerait pas du désordre actuel où règne le cas par cas ; il faudra également se garder de l’écueil d’une rédaction en contradiction avec les textes européens. Rappelons que la Convention européenne des droits de l'homme mentionne la liberté religieuse comme liberté essentielle dans une logique anglo-saxonne. Quant à la Charte des droits fondamentaux, adjointe au projet de Constitution européenne si ardemment défendue par nos gouvernants, elle  reconnaît à l’article II-10 « …la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et l'accomplissement des rites. » Il est vrai, cependant, qu’après le récent échec du sommet de Bruxelles son adoption est partie remise.

 

La vigilance s’impose donc, d’autant que les dérapages ne sont pas à exclure. Pour que l’essentiel demeure, pour vaincre les assauts obscurantistes, il faut faire vivre l’égalité et l’universalisme républicains. En la matière, il y a fort à faire !

 

Où sont l’égalité et l’universalisme républicains pour les privés d’emploi que la réforme de l’Unedic prive désormais d’assurance-chômage ? Cette réforme qui résulte d’un accord conclu le 20 décembre 2002 entre patronat, CFDT, CFTC et CFE-CGC est entrée en vigueur pour tous au 1er janvier dernier, elle se traduit par la hausse des cotisations, le durcissement des conditions d’entrée et la réduction de la durée d’indemnisation. Selon les projections de l’Unedic, d’ici à 2006, ces nouvelles mesures excluront de l’indemnisation (et donc des statistiques) 613 000 chômeurs.

Avec la mise en place du RMA, le gouvernement prétend inciter des employeurs à embaucher des RMIstes car, du fait de l’aide versée par les départements, ceux-ci ne devront plus payer qu’un complément de salaire. Le RMA ne peut être conclu que pour une durée maximum de 18 mois et un temps de travail minimum de 20 heures hebdomadaires. Que dire sinon qu’il s’agit là d’une farce maintes fois jouée : les cadeaux au patronat n’ont jamais créé d’emplois stables en nombre ! Au contraire, ils sont systématiquement mis à profit pour développer la flexibilité du travail et accentuer la pression sur les salaires : en 1997, des données fournies par Eurostat indiquaient que les salaires horaires des salariés à temps partiel constituaient 71 % de ceux des personnes travaillant à temps plein.

 

Où sont l’égalité et l’universalisme républicains quand un coup de chaleur exceptionnel anéantit des milliers de personnes âgées ? Ce que la catastrophe de la canicule a révélé, c’est d’abord une organisation peu solidaire de notre société. En effet bon nombre de personnes n’auraient pas dû se retrouver aux urgences, il suffisait pour cela de les faire boire et de les doucher ! Seulement voilà, depuis trop d’années, les gouvernements successifs rechignent à prendre en compte cette mutation considérable et irréversible de la société que représente le travail des femmes. Résultat : de graves carences en nombre de crèches, d’écoles maternelles, de services d’aide à domicile… En effet, conservatisme et manque d’ambition aidant, on suppose que les femmes continueront d’assurer avec la même efficacité qu’autrefois les soins aux enfants et aux personnes âgées. A ce sujet, on peut dire que les discours culpabilisants et moralisateurs du Premier ministre frisent l’indécence.

 

Où sont l’égalité et l’universalisme républicains lorsque l’emploi n’est pas une priorité gouvernementale ? Le travail rémunéré, source de liberté, élément structurant du rapport au monde et à la société, occupe une place centrale dans les représentations de chaque individu. Pourtant, et contrairement aux affirmations du chef de l’État, la priorité n’est pas au développement de l’emploi. Non, la priorité est à la baisse des chiffres du chômage ! Les mesures peuvent être brutales comme il est dit ci-dessus ou plus sournoises… Des mesures comme les préretraites ou l’APE (Allocation parentale d’éducation) ont contribué des années durant à pousser des salariés hors du monde du travail sans pour autant les faire basculer dans la catégorie chômeurs, catégorie hautement dangereuse pour les politiques. Mais les faits sont là, entre 1994 et 1997, le taux d’activité des mères ayant un deuxième enfant de moins de trois ans a chuté de 15 points passant de 70 % à 55 %. La PAJE (Prestation d’accueil du jeune enfant), ne peut qu’accentuer cette tendance vers le non-emploi. En effet, cette prestation entrée en vigueur au 1er janvier 2004, propose un complément retrait d’activité de 334 € pour une durée de trois ans à partir du deuxième enfant et pour une durée de six mois (ce qui représente une nouveauté) dès le premier enfant.

 

Pour faire vivre l’égalité et l’universalisme républicains, il est grand temps d’affirmer la primauté du pôle public, au service de l’intérêt général, sur le pôle financier, pour le bien-être de quelques-uns. Après le 11 septembre 2001, les guerres d’Afghanistan et d’Irak ont ajouté aux ravages du libéralisme, 2002 et 2003 auront été des années noires pour l’emploi tant industriel (-155 200 emplois depuis le premier trimestre 2002) que public (marche forcée vers la privatisation oblige, on compte –5000 emplois chez France Télécom, -10 000 à EDF). Pour relancer durablement la machine économique, il ne suffit pas d’attendre une hypothétique reprise venue d’outre-atlantique. La France et ses partenaires doivent assigner à la Banque centrale européenne une autre politique que celle de l’Euro fort qui pénalise nos exportations, favorise le jeu mondial du dollar, empêche la mise en place d’une stratégie de croissance et d’emploi. Pour sortir l’économie du marasme actuel, il faudrait un véritable effort d’investissement public et privé soutenu par une volonté politique forte. Malheureusement, ce gouvernement, pas plus que les précédents, ne fixe cette priorité aux gestionnaires du pays. Pourtant la satisfaction des besoins populaires est un moyen de couper l’herbe sous les pieds aux intégristes de tous poils ! Soyons lucides, une loi ne peut être qu’un élément du dispositif, une loi seule n’y suffira pas !