Liée au mouvement français pour le planning familial, la spécialité française de gynécologie médicale a vu le jour en 1966.

 

87 % des praticiens sont des femmes, spécialistes du suivi global des problèmes de santé spécifiques des femmes. Cette réalité n’est pas étrangère au fait que la spécialité est très liées aux luttes féministes de ces trente dernières années.

 

La profession a largement participé à la reconnaissance du droit à la contraception et à sa diffusion. Elle a contribué à sortir l’interruption volontaire de grossesse de la clandestinité et à prendre en compte les troubles de la sexualité.

 

En 1986 Michèle Barzach, supprimait l’enseignement de la spécialité… Partie d’Albi en 1997 et impulsée par le « Comité de défense de la gynécologie médicale », la pétition pour son rétablissement,  avait recueilli deux millions de signatures au début de l’année 2003.

 

Par décret paru au journal officiel le 1er février 2003, le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin a rétabli le diplôme de gynécologie médicale.

 

Tous les problèmes sont-ils réglés pour autant ? Pas sûr…

Dans cette affaire, les motivations inavouées des différents gouvernements étaient de faire des économies sur les dépenses publiques.

Ces motivations demeurent, Europe libérale oblige !

 

Jusqu’en 1986, deux spécialités gynécologiques étaient enseignées : la gynécologie obstétrique et la gynécologie médicale. Cette année là vit la suppression de l’enseignement de la gynécologie médicale.

 

Pourquoi ?

Officiellement pour se conformer aux directives Européennes qui définissent un certain nombre de critères minimaux devant faire l’objet d’une harmonisation et d’une reconnaissance entre les Etats membres, ceci en vue de permettre la liberté de circulation et d’établissement des professionnels de la santé partout en Europe.

 

Cependant, les directives invoquées par les tenants de la suppression précisent que : « …ces critères ne concernent que les spécialités communes à tous les Etats membres ou à deux ou plusieurs Etats membres. » Or, La gynécologie médicale est une exception française, chargée de la prévention des cancers, des MST et de tous les soins gynécologiques. Elle a, dans notre pays, fait la preuve de son efficacité : 60 % des Françaises sont suivies, le taux d’hystérectomies (ablation de l’utérus) est de 6,7 % en France contre 30 à 46 % en Europe et dans les cas de cancer du sein les Françaises ont une chance de survie de 13 % supérieure aux femmes du reste de l’Europe.

 

Les raisons invoquées relevaient en premier lieu d’un faux juridique !

Il était doublé d’une hypocrisie politique…

 

Ce qui était et reste vrai en revanche, c’est que l’Europe libérale impose aux Etats membres un contrôle strict de leurs dépenses publiques. La suppression du diplôme de gynécologie médicale, obtenu au bout de trois ans d’études de spécialisation répondait tout à fait à ces exigences là.

En effet, pour faire face aux besoins, il fut prévu que les médecins généralistes recevraient une formation complémentaire de deux à trois mois pour « prendre en charge une série d’actes [jusque là] confiés aux spécialistes par exemple : surveillance de la grossesse, prescription des traitements contraceptifs et traitements hormonaux de la ménopause » et qu’ils pourraient adresser les cas difficiles aux gynécologues obstétriciens et aux chirurgiens.

 

En l’occurrence derrière le prétendu impératif Européen d’harmonisation se cachait la volonté de réaliser de substantielles économies au mépris de la santé des femmes !

 

L’année 2000 a vu la création, sous l’égide de Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale du gouvernement Jospin, d’un nouveau diplôme de « gynécologie obstétrique et gynécologie médicale » ce qui ne satisfaisait nullement les nombreuses et nombreux pétitionnaires pour le rétablissement de la gynécologie médicale car la mise en commun des deux diplômes désavantageait le second. En effet le choix de l’internat se serait majoritairement porté sur l’obstétrique, spécialité hospitalière où l’on manque cruellement de praticiens au détriment de la gynécologie médicale qui est une discipline de terrain.

D’ailleurs, le CNESER (Conseil National de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche) auquel le Ministère de l’Education Nationale doit nécessairement soumettre tous les projets ministériels relatifs à l’organisation de l’enseignement supérieur a rejeté par un vote unanime et à deux reprises le projet de création d’un diplôme commun… Le gouvernement a refusé de tenir compte de cet avis.

 

Parallèlement, côté sécurité sociale, se menaient d’autres offensives contre les dépenses publiques : le médecin référent et le dépistage de masse.

 

Avec le système du médecin référent, les patients quels qu’ils soient sont adressés par le généraliste au spécialiste, toute visite directe chez un spécialiste est peu ou pas remboursée par la sécurité sociale.

D’une manière générale on voit poindre là une médecine à deux vitesses. Ceci est particulièrement vrai dans le domaine de la gynécologie médicale où les femmes ont pris l’habitude ces trente dernières années de consulter d’elles-mêmes « leur » gynécologue.

Pour l’heure, devant le peu de succès rencontré par les tentatives de mise en place de ce système, le projet est un peu mis en sourdine. On pourrait le revoir sur le devant de la scène à l’occasion du prochain débat sur le financement de la sécurité sociale.

 

Autre serpent de mer libéral, le dépistage de masse.

De quoi s’agissait-il ? La CNAM a voulu remplacer le dépistage individuel des consultations gynécologiques dit, pour la circonstance, « dépistage sauvage » par un dépistage de masse organisé. Dans les départements pilotes, il était prévu que les femmes reçoivent une convocation tous les trois ans pour faire des examens qui jusque là se pratiquaient tous les ans ou tous les dix-huit mois dans les cabinets de villes.

A la raison invoquée : « la consultation gynécologique ne touche que 60 % des femmes », les spécialistes et les femmes ont rétorqué que le système français avait fait la preuve de son efficacité et qu’il serait plus judicieux d’organiser des campagnes d’information en direction des 40 % de femmes qui ne consultent pas, plutôt que d’imposer à toutes un examen anonyme et à intervalles trop espacés.

 

Par décret paru au journal officiel du 1er février 2003, le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin rétablit le diplôme autonome de gynécologie médicale. C’est une victoire importante !

 

Ce n’est qu’une étape car aujourd’hui nous n’avons plus que 1 750 gynécologues médicaux en activité, contre 2 000 en 1998 et si rien n’était fait il n’en resterait plus que 500 en 2020.

Dans ces circonstances, les délais d’attente s’allongent et les médecins ne sont pas toujours en mesure de prendre de nouvelles patientes.

Autant dire que des mesures énergiques pour rattraper le temps perdu s’imposent !

 

Actuellement, le Comité de défense de la gynécologie médicale fait signer une pétition réclamant :

 

-         la création de 119 postes d’internes par an ;

-         la nomination d’enseignants universitaires ;

-         la garantie assurée par un texte ayant force de loi, de l’accès direct au gynécologue de son choix, avec remboursement par la sécurité sociale des consultations et des soins s’y rapportant, sans pénalisation financière.

 

Ces revendications seront-elles entendues ?

A l’heure où le gouvernement, pris dans la tourmente de la contestation sociale, enferré dans l’étau des critères de Maastricht tente auprès de ses partenaires européens une hypothétique négociation pour un assouplissement du pacte de stabilité, rien n’est moins sûr ! La vigilance s’impose !